Friedrich Hölderlin   passage                                                                                    traduction proposée par Patrick Guillot

              DER GANG AUFS LAND
                                                                                An Landauer
                        LA PROMENADE À LA CAMPAGNE

Komm ! ins Offene, Freund ! zwar glänzt ein Weniges heute
Viens ! dans l’ouvert, ami ! ça ne brille certes qu’un peu aujourd’hui
     Nur herunter und eng schließet der Himmel uns ein.
     En dessous, et nous serre à l’étroit le ciel.
Weder die Berge sind noch aufgegagen des Waldes
Les monts ne sont pas découverts, ni les cimes
     Gipfel nach Wunsch und leer ruht von Gesange die Luft.
     Des forêts, à notre souhait, et vide de chants l’air reste figé.
Trüb ists heut, es schlummern die Gäng und die Gassen und fast will
C’est couvert aujourd’hui, somnolent les allées et les ruelles, et presque
     Mir es scheinen, es sei, als in der bleiernen Zeit.
     Me semblerait-il que c’est ainsi que dans l’âge de plomb.
Dennoch gelinget der Wunsch, Rechtglaubige zweilfen an Einer
Pourtant se réalise le souhait, les vrais croyants ne doutent pas pour une seule
     Stunde nicht und der Lust bleibe geweihet der Tag.
     Heure, et au plaisir demeure consacré le jour.
Denn nicht wenig erfreut, was wir vom Himmel gewonnen,
Car ce n’est pas peu que nous réjouit ce que nous avons gagné du ciel
     Wenn ers weigert und doch gönnet den Kindern zuletzt.
     Quand il se refuse et pourtant se donne aux enfants, pour finir.
Nur daß solcher Reden und auch der Schritt’ und der Mühe
Rien que pour un tel dire et aussi les démarches et les peines
     Wert der Gewinn und ganz wahr das Ergötzliche sei.
     Soit digne le gain et tout à fait vrai le délectable.
Darum hoff ich sogar, es werde, wenn das Gewünschte
C’est pourquoi j’espère même que sera, si nous commençons
     Wir beginnen und erst unsere Zunge gelöst,
     Le souhaitable, et notre langue d’abord déliée,
Und gefunden das Wort, und aufgegangen das Herz ist,
Et trouvé le mot, et le cœur est à découvert,
     Und von trunkener Stirn höher Besinnen entspringt,
     Et du front enivré de plus hautes pensées jaillissent,
Mit der unsern zugleich des Himmels Blüte beginnen,
Avec les nôtres du même coup commence la floraison du ciel,
     Und dem offenen Blick offen der Leuchtende sein.
     Et au regard ouvert est ouvert le lumineux.

Denn nicht Mächtiges ists, zum Leben aber gehört es,
Car ce n’est pas au puissant mais à la vie qu’appartient
     Was wir wollen, und scheint schicklich und freudig zugleich.
     Ce que nous voulons, et qui semble convenable et joyeux du même coup.
Aber kommen doch auch der segenbringenden Schwalben
Mais cependant viennent aussi des hirondelles porte-bonheur
     Immer einige noch, ehe der Sommer, ins Land.
     Toujours quelques-unes encore, avant l’été, dans le pays.
Nämlich droben zu weihn bei guter Rede den Boden,
À savoir là-haut consacrant d’un bon dire le sol
     Wo den Gästen das Haus baut der verständige Wirt ;
     Où pour les invités la maison est bâtie par l’hôte avisé ;
Daß sie kosten und schaun das Schönste, die Fülle des Landes
Qu’ils goûtent et voient le plus beau, la plénitude du pays,
     Daß, wie das Herz es wünscht, offen, dem Geiste gemäß
     Qu’ainsi que le cœur le souhaite, ouvert, à la mesure de l’esprit
Mahl und Tanz und Gesang und Stuttgarts Freude gekrönt sei,
Festin et danse et chant et la joie de Stuttgart soient couronnés.
     Deshalb wollen wir heut wünschend den Hügel hinauf.
     Pour ça souhaiterions-nous aujourd’hui gravir la colline.
Mög ein Besseres noch das menschenfreundliche Mailicht
Puisse un meilleur encore, la lumière de mai amicale aux hommes,
     Drüber sprechen, von selbst bildsamen Gästen erklärt,
     Parler là-dessus, éclairant par elle-même des hôtes malléables,
Oder, wie sonst, wenns andern gefällt, denn alt ist die Sitte,
Ou, comme jadis, s’il plaît à d’autres, car ancienne est la coutume,
     Und es schauen so oft lächelnd die Götter auf uns,
     Et nous regardent si souvent en souriant de nous les dieux,
Möge der Zimmermann vom Gipfel des Daches den Spruch tun,
Puisse le charpentier, depuis la cime du toit, énoncer la sentence,
     Wir, so gut es gelang, haben das Unsre getan.
     Nous, aussi bien qu’il se peut, avons fait notre part.

Aber schön ist der Ort, wenn in Feiertagen des Frühlings
Mais ce lieu est beau, quand aux jours de fête du printemps
     Aufgegangen das Tal, wenn mit dem Neckar herab
     Se découvre la vallée, quand avec le Neckar ici-bas
Weiden grünend und Wald und [all die grünenden] Bäume
Les pâturages verdoyant et la forêt et les arbres du rivage se balançant
     Zahllos, blühend weiß, wallen in wiegender Luft,
     Innombrables en floraison blanche ondulent dans l’air berceur,
Aber mit Wölkchen bedeckt an Bergen herunter der Weinstock
Mais couvert de nuages légers sur les monts rougeoyants le vignoble
     Dämmert und wächst und erwarmt unter dem sonnigen Duft.
     Va poindre et croître et tiédir sous l’arôme ensoleillé.
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